Nikolaï Alexéïévitch Ivanov, dit Ivanov, est le personnage principal de la pièce éponyme. La pièce s’ouvre sur cet homme, las de tout, acculé par l’ennui, ruiné, en désamour. L’histoire est simple, presque anecdotique: Ivanov n’aime plus sa femme, Anna, qui souffre d’une maladie grave. Accablé par le médecin de sa femme et criblé de dettes, Ivanov ne sait que faire. Il fréquente les Lebedev, un riche couple. Dans leur salon se côtoient des êtres médiocres et hypocrites. Sacha, une femme poétique, fille des créanciers d’Ivanov, est amoureuse de ce dernier ou, du moins, aspire à le désennuyer.
Ivanov est une pièce russe. Cependant, les acteurs ne garderont de russe que le nom des personnages qu’ils incarnent. Le contexte historique et politique importe peu: le lieu de l’action est indéfini, impalpable, vacillant constamment entre la bouffonnerie et la mélancolie. Dans cette «Comédie en quatre actes et cinq tableaux (1887)» les dialogues incessants montrent des hommes qui s’ennuient, se donnant sans cesse en spectacle. Chacun veut exister plus que les autres et désamorcer l’ennui avec son propos. Plusieurs protagonistes incarnent des solutions face au temps qui passe. Ivanov n’est en réalité qu’une réponse parmi les autres. Les conversations se tissent sans que l’action ne progresse, sans qu’aucune certitude ne soit fournie au spectateur. L’hypocrisie fait tourner la pièce: il devient impossible de démêler le vrai du faux.
Le spectateur insiste à une fresque continue, qui n’aboutit cependant à aucun chef-d’œuvre…
Le 24 octobre 1887, Tchékhov, à son frère:
«J’ai voulu donner dans l’originalité: je n’ai pas montré le moindre monstre, pas le moindre ange (même si je n’ai pas su me dispenser des bouffons)».